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Traversée mystique au Fer à Cheval
Traversée mystique au Fer à Cheval
17 Août 2020
Haute-SavoieUn des sites les plus spectaculaires de Haute-Savoie, Le Fer à Cheval. Un endroit que je ne me lasse jamais de visiter.
Ce jour-là, je partage la magie des lieux avec mon fils et un ami rencontré dans un groupe photo.
Avant toute chose, c’est déjà l’histoire d’une vallée, la vallée du Giffre. Rivière qui m’a vu grandir, qui a dessiné mes rêves. Cette rivière prend sa source dans plusieurs torrents, ruisseaux et résurgeances venant des hauteurs du cirque, au pied du Mont Ruan et de son glacier. Elle se marie rapidement avec un autre affluent principal, le Giffre des Fonds, de la vallée voisine.
La fougue des ruisseaux forme cette rivière de caractère qui a façonné la région du Haut-Giffre et sa vallée jusqu’à se jeter dans l’Arve quelques 46 km plus bas.Le site du Fer à Cheval pourrait être vu comme la genèse de la vallée du Giffre.
Lors du jurassique (199 à 145 millions d'années), se forment les roches calcaires du massif. Ces roches se sont déposées au fond de l'océan Téthys. Au jurassique inférieur (199 à 175 MA), la mer est chaude et profonde et les dépôts argileux dominent, favorisant une lente sédimentation des fonds marins. Lors de la surrection des Alpes, il y a 50 millions d’années, ces masses rocheuses sont fortement plissées et poussées vers l’ouest. On les retrouve vers le fond de la combe et vers les premières falaises du cirque.
Le cirque du Fer-à-Cheval et le Fond de la Combe sont des bassins torrentiels formés par l'érosion des barres calcaires. Au quaternaire, les glaciers s'y installèrent. Ils achèveront la formation de cet amphithéâtre. Depuis leurs disparitions, à la fin de la glaciation, il y a 15’000 ans, les éboulements et les cascades ont effacé la plupart de leurs traces. Le vallon du Fond de la Combe a cependant gardé sa forme en auge caractéristique des glaciers.
Il ne subsiste que quelques hauts glaciers tels que celui du Ruan, et du Prazon. Celui du Cheval Blanc a quant à lui disparu ces dernières années. Et malheureusement les deux autres suivront rapidement.
Les éboulements des falaises du site laissent quelques traces dramatiques dans l’histoire, en 1600, 1602, 1880 et plus récemment 1944, d’importantes chutes de pierre emportent des âmes, ou créent des inondations dévastatrices avec les eaux du Giffre.
Le Fer à Cheval précède un village chargé d’histoire. Sixt.
Sixt se trouve un peu en contre-bas. Flanqué en fond de vallée, encerclé de montagnes abruptes. Le village est traversé par le Giffre, aux eaux bleues et scintillantes. Jaques Balmat, le premier alpiniste à gravir le Mont Blanc, termine ses jours dans le bourg.
Il accueille une abbaye construite au 12ème siècle et dans les siècles passés, il est un lieu privilégié pour le pastoralisme.
Par l’engouement pour les sommets, il sera le point de départ pour des courses renommées, telles que le Buet, le Tenneverge, Le Ruan, et bien d’autres sur les vallons de Sales et d’Anterne. Une compagnie des guides y sera créée en 1865.Le cirque du Fer à Cheval, c’est aussi l’histoire des hommes et des femmes qui ont accompagné les randonneurs depuis des décennies. Le chalet de Prazon, du Boret ainsi que de la Vogealle, ont chacun une histoire, regorgeant d’anecdotes, de joies et de malheurs, que relate un merveilleux ouvrage : Les Refuges du Haut-Giffre (https://www.auvieuxcampeur.fr/refuges-du-haut-giffre.html) que je ne saurais trop vous conseiller.
Le Cirque du Fer à Cheval est au cœur de la réserve naturelle de Sixt-Passy. Une protection tenue par une association active et des acteurs engagés qui déploient beaucoup d’efforts pour canaliser un flot de visiteurs toujours plus nombreux, ce qui n’est pas exempt de problème. Espérons que le bon sens primera et préservera la faune et la flore.
En arrivant sur le site, surtout au printemps, ce sont les cascades qui jettent leur puissance et leurs eaux tumultueuses du haut des murs calcaires qui se dressent d’une verticalité de 500 ou 700m parfois. Cascade de la Lyre, de la Genette, la Méridienne, la Gouille Verte, ou encore la Pissevache, la Citerne ou celle du Folly, et encore bien d’autres.
Nous débutons notre balade au pays des cascades dans ce décor de fraicheur.
Sébastien est un amoureux de la nature, des randos et de la montagne. Je souhaitais ardemment le rencontrer pour partager les émotions et les expériences que la montagne nous procure.
Photographiquement parlant, ce jour est parfait. Le temps est assez torturé, ce qui promet des lumières délicieuses et le manque de soleil décourage bon nombre de promeneurs.
Le Fer à cheval peut prendre une multitude de visages. Parfois serin dans les douces chaleurs d’automne, rayonnant de mille couleurs, parfois glacial dans un bleu profond figé par l’hiver, parfois explosif dans le fracas des avalanches printanières, ou encore radieux à l’éveil de la nature, quand les jeunes bouquetins cabriolent et que les oiseaux embellissent le calme de la vallée de leurs champs mélodieux. Aujourd’hui, l’ambiance est austère, sombre, comme enfermée par une main divine. Les nuages bas s’accrochent aux cimes, les corolles de brume entourent les cascades qui se jettent dans l’abime.
En progressant vers le fond de la vallée, Sébastien et moi partageons nos anecdotes, nos histoires de bivouac, nos souvenirs de montagnes. J’apprends beaucoup sur les sites des Pyrénées que n’ai encore jamais eu l’occasion de découvrir. Je lui parle des joyaux des Alpes du Nord.
Jusque tard dans la saison, des névés sont encore visibles au pied des plus grands couloirs, témoins d’avalanches conséquentes. On comprend rapidement pourquoi il est interdit de s’aventurer dans la zone en hiver.
Tout au long du sentier, nous sommes bercés par le son des torrents énervés qui dévalent les falaises.
Le cirque est un endroit magique qui nous exulte et débride notre créativité. L’instant me dévoile l’excitation des nuages qui se déchirent sur les arrêtes sombres. Le spectacle est total, presque terrifiant.
Au fur et à mesure de notre progression le panorama change, nous nous sentons dans le creux de la main d’une puissance minérale.
Tout en suivant le Giffre, nous remontons jusqu’au au bout du cirque. L’apothéose nous attend au Bout du Monde. Endroit qui porte bien son nom. Devant nous, des parois se dressent tels les murailles infranchissables d’un donjon. Au-delà le glacier du Ruan et la frontière suisse.
Cependant, un sentier continue sur la gauche pour rejoindre le chalet du Boret.
En plongeant notre regard vers la vallée, nous avons l’impression de nous enfuir dans un autre monde. Une vallée féérique et mystique digne de film Heroic Fantasy.
De part et d’autre de puissantes falaises se posent en gardien de la vallée, asseyant leur base minérale en marge d’une végétation déterminée à survivre à la rigueur des hivers.
Un panorama qui nous renvoie à notre humble petite dimension humaine. Mais malgré cette immensité que nous voudrions éternelle, le paysage changera inexorablement.
Pour un autre regard sur ce cirque, je vous invite à découvrir les images et textes de Sébastien :
https://sebastienspeller.wixsite.com/sspn/copie-de-s%C3%A9ries?lightbox=dataItem-khj0fdvc
https://www.facebook.com/SpellerSPhotographie/
https://www.instagram.com/sebastien_speller_photographie/?hl=fr
Tags : montagne, faucigny, nature, randonnée, alpes, haute-savoie, sixt, samoens, été, brume, cascade, fer à cheval
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